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Sophie Jaques du Minnesota laisse un héritage autant sur la glace qu’en dehors

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par Ben Osborne

Lorsque nous avons pris contact avec la défenseure vedette du Frost du Minnesota, Sophie Jaques, au téléphone mardi dernier, la situation ne semblait pas idéale pour les chances de qualification du Frost pour les séries éliminatoires. Minnesota venait de subir une défaite de 2-0, à domicile, contre New York en dernière place, et devait soudainement enchaîner deux victoires à l’extérieur—face à des adversaires désespérés—pour se qualifier pour les séries éliminatoires de la LPHF.

Les calculs n’étaient peut-être pas en faveur du Minnesota, mais Jaques est restée imperturbable. « Cela montre simplement la profondeur de cette Ligue, a déclaré Jaques calmement. Nous avons encore une chance si nous gagnons nos deux matchs. Cela prouve à quel point la Ligue est compétitive. Nous avons eu quelques rebonds malchanceux, avons concédé des buts dans les deux dernières minutes… si l’un de ces buts n’avait pas été marqué, nous aurions déjà les points nécessaires pour être en séries. »

Les paroles de Jaques se sont révélées complètement prophétiques. Le Frost a blanchi la Charge 3-0 mercredi soir à Ottawa, puis a littéralement écrasé le Fleet de Boston lors du dernier match de la saison samedi, 8-1. Jaques a largement contribué à cette victoire cruciale, inscrivant deux buts et une passe.

Digne d’une reine, en effet.

En un clin d’œil, les championnes en titre étaient de retour en séries, où elles affronteront les Sceptres de Toronto dans un match revanche de la demi-finale de l’année dernière. Rien d’étonnant à cela, car surmonter les obstacles et accomplir des exploits n’est pas quelque chose de nouveau pour Sophie Jaques.

À seulement 24 ans, elle est déjà l’un des espoirs les plus captivants de la LPHF, une défenseure polyvalente et calme, dont le talent sur la glace est égalé par son intelligence et son humilité en dehors. Des titres NCAA aux convocations avec l’Équipe nationale canadienne, en passant par une première saison professionnelle mouvementée, Jaques a abordé chaque étape avec une détermination tranquille qui dément son âge.

Jaques a grandi à Toronto et est tombée amoureuse du hockey comme de nombreux enfants de la région. Elle s’est donnée pour objectif de jouer au hockey universitaire aux États-Unis et s’est engagée avec l’université d’Ohio State, rejoignant un programme de hockey féminin qui avait formé de remarquables joueuses individuelles mais qui n’avait pas vraiment marqué la scène nationale. Cela a changé pendant le passage de Jaques.

« Lorsque nous nous sommes toutes engagées à l’Ohio State, c’était une équipe à égalité de victoires et de défaites, se souvient Jaques. Je ne pense pas qu’elles aient remporté de championnats en hockey féminin. Gagner un championnat national lors de ma dernière année a vraiment été spécial. »

Ce championnat était bien plus qu’un trophée. Il représentait l’aboutissement de plusieurs années de construction du programme et témoignait de la culture que Jaques a contribué à façonner. « Il y a eu tellement de progrès. Au début de ma carrière, on suppliait les gens de venir aux matchs. À la fin, on devait refuser des partisan·es à la porte », raconte Jaques avec fierté.

Mais ses accomplissements, qui sont bien franchement trop nombreux pour être énumérés ici, dont la victoire du prix Patty Kazmaier Memorial Award en 2023 en tant que meilleure joueuse du pays lorsqu’elle a joué une année supplémentaire à Columbus en tant qu’étudiante diplômée, ne se limitaient pas à la glace.

Facebook @ohiostatewomenshockey / Via Facebook.com 

Jaques, qui est noire, a obtenu ses diplômes de premier cycle et de maîtrise en ingénierie pendant son séjour à Columbus, un exploit impressionnant tout en jonglant avec les exigences du sport de haut niveau, et elle a été nommée l’Arthur Ashe Jr. Female Sports Scholar of the Year en 2022 (Boursière de l’année Arthur Ashe Jr. pour le sport féminin).

Jaques a été choisie en 10e position lors du tout premier repêchage de la LPHF en 2023, par une équipe de Boston et un marché qui étaient ravis de l’accueillir et reconnaissaient l’importance de sa carrière. Hélas, après seulement sept matchs avec le Fleet, Jaques a été envoyée à Minnesota en tant que pièce maîtresse du premier échange de l’histoire de la LPHF.

« J’ai juste reçu un appel téléphonique de la DG de Boston. Pas beaucoup de préavis, se souvient Jaques. J’ai appris cela un dimanche soir, et mon vol partait le lundi matin. »

Ce changement brusque aurait pu déstabiliser n’importe quelle joueuse, mais Jaques s’est bien adaptée grâce à un visage familier. « Une des raisons pour lesquelles j’ai pu m’ajuster assez rapidement, c’est que [le Minnesota] avait Liz Schepers de l’Ohio State dans son équipe. Elle avait de la place chez elle pour que je puisse vivre, donc je n’ai pas eu à rester à l’hôtel. Ça m’a vraiment facilité les choses et m’a permis de ne pas avoir trop de soucis en dehors de la glace. Sur la glace, c’est venu naturellement et c’était assez facile. »

Jaques a joué 15 matchs de saison régulière pour le Minnesota la saison dernière, inscrivant deux buts et huit passes, et a trouvé son rythme avec ses coéquipières au moment où cela comptait le plus.

Après s’être qualifiée pour les séries éliminatoires en tant que quatrième et dernière tête de série lors du dernier jour de la saison régulière (ça vous dit quelque chose?), Minnesota a trouvé son rythme au moment parfait. « Nous avons eu des hauts et des bas, mais nous avons réussi à connaître le succès quand il le fallait », se souvient Jaques d’une série où Minnesota a surmonté un déficit de 2-0 lors de la première série de la ronde éliminatoire contre Toronto avant de battre Boston dans une autre série de cinq matchs en finale de la LPHF pour remporter la toute première Coupe Walter.

L’équipe a célébré sa victoire lors de cette nuit de fin mai et à plusieurs reprises pendant l’intersaison suivante, mais l’un des moments les plus mémorables est survenu récemment, lorsque les championnes de l’année dernière ont chacune reçu une bague officielle de championne.

« C’est dommage d’avoir perdu ce soir-là, mais ça a quand même été une superbe soirée », a déclaré Jaques à propos du 27 avril, lorsque le Frost s’est incliné contre les Sirens mais a ensuite été honoré lors d’une importante cérémonie de remise de bagues après le match. « On a pu vivre le moment à fond et le célébrer. Puis dès le lendemain matin, on était de retour au boulot, à préparer le prochain match. »

La concentration inébranlable de Jaques et son jeu stable et orienté vers l’attaque depuis la ligne bleue ont attiré l’attention de Hockey Canada, et elle a joué un rôle clé au sein de l’équipe canadienne médaillée d’argent lors du Championnat mondial féminin de l’IIHF le mois dernier.

« Le Mondial a été une super expérience, a-t-elle déclaré. [La Tchéquie] a fait du très bon travail en tant qu’hôte. Passer du temps avec l’équipe nationale a été vraiment agréable. Ce n’est pas le résultat qu’on voulait, mais j’en retire beaucoup pour ma carrière. »

Ne soyez pas surpris·es si la prochaine grande étape de sa carrière internationale inclut une participation aux Jeux olympiques d’hiver de février prochain. « J’ai eu une très belle expérience avec les filles et le personnel, et [les Jeux olympiques], c’est clairement un objectif pour moi, a affirmé Jaques. Je vais saisir toutes les occasions qu’on me donne. »

Même si sa carrière n’en est encore qu’à ses débuts, Jaques est déjà très consciente de son rôle de modèle, en particulier pour les jeunes filles issues de communautés racisées.

« Au début, je ne réalisais pas à quel point c’était important », a déclaré Jaques, qui a terminé la saison régulière avec 7 buts, 15 passes et 22 points. « Mais maintenant, je vois combien de jeunes filles nous admirent et l’impact qu’on a sur elles. C’est vraiment génial. C’est définitivement une des raisons pour lesquelles je continue à jouer, pour inspirer plus de filles à jouer au hockey et contribuer à la croissance du sport. »

L’un des moteurs de l’engagement de Jaques envers ses études à Ohio State, c’était sa volonté de bâtir une carrière solide en ingénierie. « Je pensais que j’utiliserais [mes diplômes] dans quelques années », a-t-elle expliqué au sujet de cette deuxième carrière universitaire entamée avant même que la LPHF ne voie le jour. « Mais maintenant que la LPHF existe, je prévois de jouer aussi longtemps que je le pourrai. Le hockey, c’est un sport tellement amusant, et je veux voir où ça me mènera. »